Encore moins d'investissement et plus de fonctionnement donc nos impôts ne vont pas tarder à augmenter
25 juin 2014
En 2014, l’effet de ciseau touchera encore toutes les strates de collectivités
par Aurélien Hélias
© Flickr-Kenteegardin
Sans surprise, les départements resteront les plus touchés du fait de leurs dépenses sociales obligatoires croissantes, observent Arkéa banques et le Forum pour la gestion des villes dans une étude prospective sur les finances locales en 2014. Mais les moyennes et grandes villes sont également touchées du fait du ralentissement de leurs recettes de fonctionnement. Seules les régions parviendront cette année à faire progresser – légèrement – leur investissement hors dette.
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Dans l’histoire récente des finances locales, 2012 avait marqué un tournant : pour la première fois, tous les niveaux de collectivités étaient touchés par le désormais effet de ciseau – croissance des dépenses supérieure à celle des recettes –, communes et intercommunalités rejoignant alors régions et département dans cette tendance.
Il en ira de même en 2014, selon la note d’analyse Arkéa Banque réalisée en partenariat avec l’Observatoire SFL-Forum du Forum pour la gestion des villes et des collectivités territoriales(1), publiée ce 23 juin.
Régions : les nouvelles ressources de 2015 se font attendre
Ce sont les régions qui affichent le différentiel le plus important : +1,8% de recettes de fonctionnement contre -0,2% de recettes de fonctionnement. L’évolution des dépenses reste pourtant modérée : « Neutralisation faite de la région PACA, les dépenses de fonctionnement n’évolueraient toutefois que de +0,5%, ce qui équivaudrait, compte tenu de l’inflation prévisionnelle pour 2014 (+0,9%, après +1,8% en 2013), à une baisse en volume des dépenses de fonctionnement régionales », note l’institution bancaire.
Malgré cette relative maîtrise des dépenses courantes, l’importante hausse des charges de personnel (18% des dépenses de fonctionnement à par rapport à 2013 (+3,7%) pèse lourd. Et ce alors que les recettes de fonctionnement stagnent, Arkéa rappelant que « les régions ne disposent d’aucune possibilité de modulation de taux sur ces recettes » et que « le montant des dotations issues de la réforme de la taxe professionnelle est figé dans le temps ».
Conséquence : les régions attendent avec impatience 2015, année à partir de laquelle elles bénéficieront d’un nouveau panier de ressources composé aux deux tiers des frais de gestion perçus par l’Etat et de leur dynamisme, leur « rythme d’évolution étant indexé à celui de l’évolution moyenne des impôts locaux considérés », rappelle la banque.
Départements : les dépenses sociales dominent les nouvelles ressources
C’est devenu une habitude : l’effet de ciseau touche particulièrement et depuis longtemps les départements, aux dépenses sociales obligatoires importantes. En 2014 encore, les dépenses de fonctionnement augmenteront bien davantage (+3,4%) que les recettes de fonctionnement (+2,7%).
Pourtant, la mise en place du pacte de confiance et de solidarité avait un temps fait espérer aux départements un retournement de tendance, l’Etat leur transférant la totalité des frais de gestion de la taxe foncière sur les propriétés bâties (830 millions d’euros) et leur offrant la possibilité de relever, de 3,8% à 4,5% au maximum, sur deux ans, le plafond des droits de mutation à titre onéreux (DMTO).
Le produit des DMTO progresserait d’ailleurs de 5,2% en 2014, moins par l’activité, faible, sur le marché immobilier, que du fait de l’utilisation de ce levier par une grande majorité de départements. Insuffisant toutefois pour contrer les 42,3 milliards d’euros de dépenses de fonctionnement prévus pour 2014, dont 24,3 pour la seule action sociale, soit +4,5% par rapport à 2013.
« Sous l’effet de la croissance continue du nombre de bénéficiaires du revenu de solidarité active socle et de la revalorisation de cette allocation au 1er janvier 2014, les dépenses qui lui sont consacrées – 7,7 milliards d’euros – progresseraient de +12,9%, après +4,7% en 2013 », développe Arkéa. La progression de 3% des charges de personnel – qui représentent 20 % des dépenses totales – n’aidant pas les exécutifs départementaux à amoindrir cet effet de ciseau.
Bloc local : le coût des personnels pèse, les subventions restent
S’agissant des recettes de fonctionnement des villes de plus de 40 000 habitants, leur progression serait ralentie : +1,2%. Car si les recettes fiscales devraient progresser de 2,1%, leur dynamisme serait annihilé pour une bonne partie par la baisse programmée des dotations (-1%). Conséquence : les dépenses de fonctionnement progresseront plus vite (+2%) que les recettes de fonctionnement.
Certes, ces moyennes et grandes villes ont largement optimisé les charges à caractère général (achats de biens et services), dépense quasi stable par rapport à 2013 (+0,5%). Mais le premier poste de dépenses, celui des personnels, progressera plus rapidement encore qu’en 2013 (+2,9% contre +2,3%).
Autre poste croissant plus inattendu : les subventions aux associations (+2,2%). « Bien que constituant une source d’économies potentielles permettant de ralentir la progression des dépenses, ces subventions n’ont pas fait l’objet de coupes budgétaires, signe de la volonté des décideurs locaux de préserver le tissu local », analyse Arkéa.
Les EPCI de ces communes sont tout logiquement dans une situation similaire : une différence de 0,4 point entre recettes et dépenses de fonctionnement, au détriment de ces dernières, mais à une échelle un peu plus élevée : +4,5% de recettes fiscales mais aussi +4,8% de charges de personnels.
Investissement : un retrait généralisé, les régions résistent
Quant à la baisse des investissements hors dette, elle devrait être partagée par presque tous les niveaux de collectivité, à des degrés toutefois divers : « modérée » pour les EPCI (-4,3%) après déjà trois années de ralentissement ; « marquée » pour les villes (-10,7%) et… continue pour les départements avec une cinquième année de recul consécutif (-3,9%).
Si la baisse du niveau d’épargne et le « contexte électoral peu propice à la mise en œuvre de projets d’envergure » expliquent en grande partie les investissements en retrait du bloc local, c’est la situation très tendue sur les dépenses de fonctionnement qui incite de nouveau les exécutifs départementaux à diminuer leurs investissements.
Dans ce tableau prospectif peu réjouissant des finances locales, seules les régions anticipent en 2014 une légère hausse de leurs programmes d’investissement (+1,8%), portées par leurs subventions d’équipement versées à des tiers (+4,7%) et « un effort notable sur le secteur du transport », témoigne Arkéa. Reste que les régions ne représenteront que 15,4% du total de ces dépenses d’investissement effectuées par des collectivités ou EPCI de plus de 40 000 habitants…
Note 01:
L’analyse porte sur 74 départements de métropole hors Paris, 104 des 181 villes de plus de 40 000 habitants hors Paris et 75 des 135 EPCI comprenant au moins une ville de plus de 40 000 habitants. -