Roland
Ries, le président du Groupement des autorités de transport (Gart)
voulait éviter un télescopage avec les élections municipales de 2014. Il
a été exaucé, même si les règles du jeu du troisième appel à projets de
transport en site propre de province ont mis du temps à être publiées.
C'est chose faite: le ministre des Transports a donné son feu vert (lire son interview) le 7 mai 2013.
Les
agglomérations ont jusqu'au 15 septembre 2013 pour remplir leurs
dossiers de candidature, et l'Etat indiquera en décembre lesquels seront
retenus dans le cadre de ce nouvel appel à projets rebaptisé
"Transports collectifs et mobilité durable". MobiliCités s'est procuré
le texte qui fixe la règle du jeu.
Concernant l'enveloppe budgétaire, pas de surprise. Comme Frédéric Cuvillier l'avait annoncé en janvier 2013,
elle sera de 450 millions d'euros. C'est aussi la somme que le Gart
réclamait après une enquête menée en 2011 auprès des collectivités
locales.
-> Téléchargez le dossier de Transport Public
En
revanche, "l'aide financière allouée dans le cadre de l'appel à projets
sera exclusive de tout autre subvention versée par l'Etat", précise le
texte.
Quels sont les projets éligibles ?
- les lignes nouvelles et/ou d’extension de réseaux : métro, tramway
(sur fer ou sur pneu), tram-train et bus à haut niveau de service
(BHNS),
- les projets de renforcement d’offre de transport collectif ou d’augmentation de capacité des infrastructures (métro ou tramway),
- les projets novateurs de services de transport urbain ou interurbain
(navettes fluviales ou maritimes et transport par câble ou crémaillère
hors stations de ski par exemple),
- les projets de construction et/ou d’aménagement de parkings à vélos, en interface avec le réseau de transports collectifs.
Principale nouveauté, sur ces 450 millions d'euros, une enveloppe sera
réservée "pour financer des projets particulièrement innovants en
matière de mobilité durable" : projets "d'information multimodale des
usagers des transports collectifs" mais aussi "d'aménagements destinés à
améliorer la performance des réseaux de transport collectif". Le
montant n'est toutefois pas précisé.
Plus original, seront également concernés "les projets concourant à
un objectif chiffré et contractualisé de report modal". Dans ce cas, la
subvention attribuée ne serait effectivement versée qu'"au vu de la
réalisation de l'objectif prévu". Une idée sans doute inspirée par la
démarche de Christian Proust, président du Syndicat mixte des transports
en commun de Belfort, qui avait demandé à l'Etat une aide financière mi-mars
2012 pour développer le réseau de bus du Territoire. S'engageant à la
rembourser si les objectifs de report modal (le passage de la voiture
particulière aux modes de déplacements collectifs) n'étaient pas
atteints.
Ni autopartage, ni vélos en libre service
Contrairement à ce que craignaient les élus en charge des transports
au Gart, cet appel à projets ne servira pas à financer les systèmes
d'autopartage, de voiture ou de vélos en libre-service. A moins,
peut-être, que leurs promoteurs ne prouvent qu'ils ont un effet direct
sur le report modal ?
L'assiette des dépenses éligibles se
limitera "exclusivement aux dépenses d'investissement strictement
indispensables à la mise en œuvre des projets" (déviation des réseaux,
infrastructures). Elle ne concernera pas le matériel roulant. Le
montant de la subvention sera établi en fonction d'un certain nombre de
critères comme la pertinence technique du projet ou son insertion dans
une politique globale de mobilité durable. Le tout épicé par le niveau
de "cohésion sociale et territoriale".
C'est le comité technique (1) chargé d'instruire les dossiers qui déterminera la position du curseur "subvention", en fonction de ces critères.
Pas de pourcentage de subvention, mais des plafonds
A la différence des deux appels à projets précédents, le nouveau ne
fixe pas de pourcentage de subvention pour chaque type d'infrastructure.
Le texte se contente d'indiquer des plafonds maximum pour "éviter la
concentration du soutien financier de l'Etat sur les projets les plus
coûteux" :
- Métro : 30 M€ par km
- Tramway, tram-train : 20 M€ par km
- Augmentation de capacité des infrastructures, 9 M€ par station de métro, 3 M€ par station de tramway
- BHNS électrique ou hybride : 8 M€ par km
- BHNS (thermique et autre type) : 5 M€ par km
- Transport par câble ou crémaillère : 20 M€ par projet
- Station maritime ou fluviale, appontement : 0,5 M€ par station
- Parking à vélos : 0,5 M€ par parking
- Projets de mobilité durable : 10 M€
Les projets facilitant le désenclavement des quartiers prioritaires
de la ville bénéficieront d'un coup de pouce supplémentaire "pouvant
aller jusqu'à 10%", indique le texte. Enfin, même si les collectivités
portent plusieurs projets, la subvention totale ne pourra pas dépasser
40 millions d'euros.
Les collectivités intéressées doivent constituer un dossier et
l'adresser avant le 15 septembre 2013 à leur préfet de région. Les
résultats seront annoncés en décembre 2013. Ensuite, si leurs projets
sont retenus, les collectivités auront jusqu'au 31 décembre 2016 pour
débuter les travaux. Faute de quoi, elles n'auront pas la subvention de
l'Etat.
Robert Viennet
(1)
le comité technique chargé de sélectionner les dossiers sera notamment
composé de représentants des administrations des ministères concernés,
d'établissements comme le Certu, l'Ademe, l'Anru et le Gart.
13 milliards d'investissements, 1,2 milliard de subventions, 1 000 km en 8 ans
Les
lois Grenelle de l'environnement votées entre 2007 et 2009 prévoient
que 2,5 milliards d'euros seront mobilisés d'ici à 2020 pour cofinancer
les nouveaux projets de transport en site propre des collectivités de
province. 1,24 milliard d'euros a déjà été consommé avec les deux appels
à projets lancés en avril 2009 et en février 2011.
Une somme qui a permis de construire ou au moins de mettre en
chantier 633 km de Bus à haut niveau de service (BHNS), 350 km de
tramway, 17 km de métro, des navettes maritimes et un funiculaire (1
km), pour un montant de 12,6 milliards d'euros de travaux.
Le premier appel à projets prévoyait une enveloppe initiale de 810
millions d'euros, mais seuls 650 millions ont été engagés, certaines
collectivités ayant abandonné ou remis à plus tard leurs projets.
Selon un bilan effectué par le ministère des Transports, le deuxième
appel a projets doté de 590 millions est en voie d'achèvement. Sur les
54 collectivités locales concernées (78 projets), 38 ont déjà signé avec
l'Etat des conventions de financement. Pour 16 autres, la subvention de
l'Etat ne sera confirmée que si les travaux sont lancés avant le 31
décembre 2013. Selon le ministère, toutes ces agglomérations ont assuré
qu'elles respecteraient le calendrier.
R.V.
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Appel à projets transport : 5 questions à Frédéric Cuvillier
Le
ministre des Transports annonce la publication des critères de
sélection des villes candidates au troisième appel à projets de
transport collectif de province. Remise des dossiers, le 15 septembre
2013. L'enveloppe de 450 millions d'euros est maintenue. Un groupe de
travail pour le plan vélo sera par ailleurs lancé en juin.
Frédéric Cuvillier, ministre délégué aux Transports. © N.A - Cliquez pour agrandir la photo
Début 2013, vous aviez annoncé le montant de l'enveloppe consacrée à ce troisième appel à projets : 450 millions d'euros.
Depuis, vous avez un peu tardé à rendre publiques les règles du jeu et
donner le feu vert aux agglomérations pour présenter leurs projets
candidats. Pourquoi ?
Parce que ce n'est pas une copie
conforme de la première génération d'appel à projets, il y a un certain
nombre de changements. Il fallait donc s'assurer que toutes les
dimensions que nous souhaitons lui donner soient respectées : que
l'ensemble des modes de mobilité durable soient couverts, que l'accent
soit donné aux projets qui relieront les quartiers urbains prioritaires,
qu'ils s'inscrivent dans l'intermodalité, et qu'ils respectent aussi le
critère de qualité de l'air.
Pourquoi ne pas avoir inclus les vélos en libre-service ou les sytèmes d'autopartage comme vous l'aviez évoqué précédement ?
Nous
installons un groupe de travail sur un plan vélo en juin 2013. Il faut
impulser les politiques en faveur du vélo, de l'autopartage et du
covoiturage. Elles viennent en appui de l'appel à projets
de transport collectif qui intègre des projets novateurs comme les
transports par câbles ou les navettes fluviales. On essaie de prendre en
compte les particularités de certaines villes et leurs besoins de
transport spécifiques.
Compte tenu de ce retard, les élus du transport demandent un
petit report au delà du 30 août pour remettre leur dossier
de candidature et le soumettre aux préfets : est-ce que ce sera
possible ?
Les candidats auront jusqu'au 15 septembre pour remettre leurs dossiers.
S'il y a plus de projets candidats, vous allez répartir les
450 millions d'euros en de plus petites parts ou bien prévoyez-vous une
rallonge budgétaire ?
Nous avons sauvé ce nouvel appel à
projets, mais je souhaite qu'il y ait un critère fort de qualité. Avec
ce premier financement, nous souhaitons déjà pouvoir évaluer cette
qualité de projet. Je pense notamment que les critères de pollution, ou
d'offre de transport dans des quartiers prioritaires et de politique de
la ville sont une nécessité; voilà pourquoi nous augmentons de 10% les
projets qui auront comme souci de désenclaver les quartiers.
Pour
toucher la subvention, les collectivités locales devront prouver qu'il y
a un report modal de la voiture particulière vers les modes de
transport collectif : ça concernera aussi des réseaux d'autobus qui
n'ont pas forcément des projets de transport en site propre ?
Oui,
cela signifie que l'on subventionne les projets qui sont les plus
vertueux et dont la finalité est de favoriser le report modal. Cette
nécessité de résultat est intéressante, elle va permettre aux
collectivités locales de dimensionner leurs projets, de tirer les
enseignements des précédents appels à projets ou des politiques de
transport précédentes. Par exemple, avec du cadencement, on peut aussi
arriver à de meilleurs résultats de trafic dans les bus.
Avec
ce troisième appel à projets, l'Etat aura consacré 1,7 milliard d'euros
pour le développement des transports collectifs de province. Le
Grenelle de l'environnement prévoyait 2,5 milliards à l'horizon 2020 :
l'Etat va t-il poursuivre cet effort ?
Je souhaite que
nous puissions y parvenir, également via l'Agence de financement des
infrastructures de transport, l'Afitf. Le transport a besoin de
croissance et de compétitivité pour assurer de l'autofinancement. S'il y
a par la suite de très bons projets, il n'y a pas de raison de ne pas
redéployer des moyens. Nous sommes dans les 11 premiers mois du
gouvernement, nous avons été très réactifs, et d'ici cinq ans, j'espère
qu'il y aura d'autres plans de transport collectif.
Propos recueillis par Nathalie Arensonas et Robert Viennet